Animali groupe lyonnais, a sortit son premier EP le 3 mars dernier. Catégorisé en tant que groupe pop et/ou psychédélique, je les ai rencontré à l’occasion du festival Woodstower (23 et 24 août 2014).
Pouvez-vous présenter votre musique ?
On n’arrive jamais à répondre à cette question. Il faudrait faire une synthèse entre plusieurs choses… On a écouté beaucoup de pop, je pense que ça se sent pas mal. Que ce soit Radiohead ou les Pink Floyd, je pense que ça passe avant cette étiquette psychédélique, on ne se considère pas forcément comme un groupe psyché forcément. Ça va avec un certain contexte, une époque, de la drogue, des stupéfiants … Ce que nous on ne fait pas. Donc oui, c’est une forme de pop.
Tu dis que « Psychédelique » marche avec une étiquette de stupéfiants. J’ai déjà lu des interviews de DJ qui trouvaient regrettable que la musique électro soit associée à la prise de drogue.
Pas forcément, mais disons que le mouvement psychédélique vient de la prise de psychotropes. Et de toute façon je crois qu’il y a un rapport direct entre l’art et la prise de drogues, ça ne date pas d’hier et on pourrait écrire une thèse là-dessus. Il y a des groupes qui ne pouvaient pas se balader sans leur dealer, je pense que c’est indissociable. C’est un mouvement et cela ne nous pose pas de problème (rires). Dans les années 70, tous les nouveaux sons fonctionnaient beaucoup avec la prise de drogue. Aujourd’hui on ne sait pas trop si notre public est consommateur et on ne pense pas que ce soit le cas. D »ailleurs on ne sait pas si on peut encore parler de « notre public ».
J’ai trouvé que votre clip pour The Alchimist avait un univers très différent de vos pochettes d’albums. Est-ce un choix d’avoir une esthétique hétéroclite ?
Déjà quand on démarre, il faut savoir que ce n’est pas évident d’avoir la force de frappe, une major qui bosse depuis trois mois pendant que l’enregistrement se fait, pour tout préparer, le clip, etc. C’est juste un manque de budget tout simplement. On est obligé de se débrouiller par nous-même. Honnêtement, on compte sur ce qu’on trouve, on adore nos pochettes et on a adoré travailler avec Etienne. Après, la cohérence dans tout cela c’est compliqué. On a décidé de se concentrer sur la musique et de ne pas trop se prendre la tête avec tout ça. On a essayé d’appeler David Lynch pour qu’il nous fasse une pochette, mais il n’a pas trop voulu (rires).
J’ai aussi l’impression qu’aujourd’hui on ne laisse pas le temps aux choses de se faire. C’est notre premier EP, pour se forger une identité ça prend du temps. Les grands groupes qu’on aime, le visuel qu’on adore ne se sont pas fait en une fois. Dans dix ans peut-être qu’on aura notre pâte, là c’est difficile de définir un style.
Vous avez l’air de rester très fidèles à vos « valeurs musicales », quels conseils donneriez-vous à des jeunes musiciens qui veulent faire un EP ?
Bosser à l’école et rentrer dans une école de commerce ! (rires)
Rester fidèle à des valeurs qui ont fait leurs preuves sur des dizaines d’années, prendre les instruments, jouer devant des gens et partir avec un vieux camion comme on fait. Il ne faut pas trop se laisser bouffer par le net. C’est bien, mais le plus important ça reste de jouer, la musique naît avant tout de la scène. Pendant longtemps on a essayé de se faire une image sur internet en postant beaucoup de choses, on a jamais eu un si bon résultat que depuis qu’on a dit : « On arrête ça et on rentre dans la vraie vie ».
Alors j’ai une question un peu à part… Quand je me suis baladée dans le festival j’ai vu qu’il y avait la Croix des Intermittents du spectacle. Qu’en pensez-vous ? Comment ça se passe du côté musical ? (La croix est le signe protestataire des intermittents du spectacle face aux nouvelles lois de l’intermittence. Pendant l’été 2014, la France a connu une grande mobilisation, avec la menace de l’annulation du Festival d’Avignon. A Lyon, le festival Les Nuits de Fourvière a annulé une de ses soirées où Vanessa Paradis était censé se produire, en soutient au mouvement).
Ce n’est pas évident car c’est très technique. D’un point de vue de promotion et de gestion de la culture, je suis assez sensible à la cause des intermittents, car on espère en être plus tard.
Si on est là à parler de budget pour la culture je pense qu’on est tous d’accord pour dire que c’est une bonne chose, mais quand le statut fait gagner de l’argent, c’est un bras de fer entre le patronat et les employés qui se crée. Il y a des pays où ils n’ont pas le statut et ça fonctionne aussi. Si on regarde tous les gens qui défendent le statut c’est vrai que nous les musiciens, on en parle pas beaucoup et on se défend très mal.
Un groupe ou un artiste à conseiller ?
Bruno, groupe lyonnais et potes à nous ! On s’occupe de faire leur EP dans nos studios, on a fait quelques dates ensemble et leur musique est terrible !
Propos recueillis par Noéva Dikili